B.- INSTITUER UN PRÊT D'HONNEUR ACCESSIBLE À TOUT CRÉATEUR
1.- LE CONSTAT : LES ATOUTS D'UNE INSERTION DANS LE CIRCUIT BANCAIRE ET D'UN APPORT INITIAL EN CAPITAL CONSÉQUENT
Une étude de l'APCE(32) montre que le taux de survie des entreprises créées avec, dès le départ, un prêt bancaire est, au bout de trois ans et demi, de 55 % contre 41 % pour les entreprises qui n'en ont pas bénéficié.
Cette étude établit, par ailleurs, que le taux de survie des nouvelles entreprises augmente avec le capital initial, surtout à partir de 100.000 francs. Le tableau ci-après illustre ce constat :
du capital investi initialement |
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Détenteur de prêt |
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Non détenteur de prêt |
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Pour autant, la création de très petites entreprises bénéficie peu de concours bancaires. Comme le souligne le rapport précité du Conseil national du crédit et du titre, les créateurs apportant moins de 25.000 francs de capital représentent 35 % de l'ensemble des créateurs et seuls 8 % d'entre eux obtiennent un financement bancaire. Le tableau ci-après illustre cette situation.
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Part des créations |
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Pourcentage de créateurs bénéficiaires de prêts bancaires |
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A ces deux paramètres, s'en ajoute un troisième qui est le rôle des réseaux d'appui au créateur. A cet égard, le rapport du Conseil national du crédit et du titre relève qu'ils sont susceptibles de faciliter l'accès au crédit d'entreprises naissantes par deux canaux : « les aides financières, et notamment les prêts d'honneur, ainsi que le cautionnement parfois apporté par les entrepreneurs « parrains » renforcent la capacité de la jeune firme à mobiliser des concours bancaires ; surtout, les réseaux se livrent à une présélection des projets qui bénéficieront de leur soutien, présélection dont la pertinence des critères au regard de la réalité économique locale conduit souvent à accroître significativement les taux de survie des entreprises éligibles ».
Ce constat est à l'origine du dispositif EDEN (Encouragement au développement d'entreprises nouvelles) (*) qui prévoit une délégation par l'État, à titre expérimental (jusqu'à fin 2000), de l'attribution de l'avance remboursable à des organismes experts tels que des associations de soutien à la création d'entreprises, des sociétés spécialisées dans le conseil ou encore des établissements financiers, locaux ou nationaux. On a déjà évoqué précédemment les retards accumulés dans la mise en place de ce dispositif. Dans son esprit, on note, toutefois, le choix de privilégier l'accompagnement du créateur en subordonnant l'avance remboursable au suivi d'une relation avec une structure d'appui. (*) texte complet sur le site
La proposition suivante tente d'intégrer ces différents paramètres dans la définition d'une aide financière, exclusivement réservée aux créateurs ou repreneurs d'entreprises, sans distinction fondée sur leur statut antérieur.
2.- UNE PROPOSITION : INSTITUER UN PRÊT D'HONNEUR DE 40.000 FRANCS ACCESSIBLE À TOUT CRÉATEUR
Compte tenu des différents éléments qui viennent d'être abordés, votre Rapporteur propose l'instauration d'un prêt d'honneur, d'un montant de 40.000 francs, auquel pourrait prétendre tout créateur, quel que soit son statut initial. Le bénéfice de ce prêt pourrait donc être cumulé avec celui de la prime de 20.000 francs évoquée supra, par les personnes les plus défavorisées qui souhaitent créer ou reprendre une entreprise.
Cette proposition rejoint, dans son esprit, celle formulée dans le rapport du Commissariat général du Plan qui suggérait la mise en place d'une aide de départ pour tous les créateurs d'entreprise, de l'ordre de 50.000 francs, dans la limite de 50 % des capitaux engagés, et remboursable en cas de survie de l'entreprise, au bout de trois ans.
Votre Rapporteur suggère toutefois que le prêt d'honneur comprenne un taux d'intérêt bonifié afin d'introduire, dès le départ, une logique de financement bancaire. Cet objectif est développé ci-après.
Ce prêt serait remboursable dans les mêmes conditions que l'avance remboursable, à savoir dans un délai maximal de 5 ans, le premier remboursement intervenant au plus tard 18 mois après le versement.
La décision d'octroi du prêt d'honneur serait prise par le « Comité Local des Partenaires de l'Entrepreneur » dont la mission et la composition ont été définies précédemment.
Dans un souci de faciliter l'insertion dans le circuit bancaire, votre Rapporteur préconise, par ailleurs, que le montant du prêt d'honneur soit versé directement à la banque, sur présentation d'un « bon » que lui aura remis le porteur de projet, bénéficiaire du prêt.
Dans ce schéma, le coût de gestion du prêt pour la banque est, dès le départ, réduit grâce à l'absence de risque. Afin d'inciter les banques à participer à ce dispositif, l'État pourrait, cependant, contribuer aux frais de gestion en versant une somme correspondant à une estimation de leur coût de laquelle serait déduite les intérêts de remboursement perçus.
Cette configuration prend en compte deux des paramètres évoqués précédemment, à savoir, d'une part, l'insertion dans le circuit bancaire et, d'autre part, le rôle des réseaux d'appui aux créateurs. Il convient, enfin, de compléter le dispositif de manière à parvenir à un apport initial conséquent.
3.- COMPLÉTER LE DISPOSITIF PAR UN CRÉDIT BANCAIRE « CLASSIQUE » GARANTI
Le dispositif décrit pourrait être utilement complété par le bénéfice d'une garantie publique pour les banques gestionnaires de ces prêts, qui accepteraient de les abonder. Cette garantie, plafonnée à 40.000 francs, permettrait d'atteindre un montant total de 100.000 francs en apports, pour les personnes, au départ écartées du circuit économique, mais dont la qualité du projet leur donnerait accès à la prime de 20.000 francs et au prêt d'honneur de 40.000 francs.
Il s'agit ainsi de favoriser un effet de levier en vue de la mobilisation de financements complémentaires au bénéfice des créateurs. Les banques sont, en effet, incitées à s'impliquer dans ce dispositif dans la mesure où le risque qu'elles prennent est considérablement réduit grâce à l'examen préalable du projet par un organisme d'appui et / ou le Comité local des partenaires de l'Entrepreneur et la mise en oeuvre d'une garantie publique, plafonnée à 40.000 francs, pour tout financement complémentaire. En outre, une participation aux frais de gestion est prévue.
Ces propositions cherchent, en définitive, à favoriser la mise en place d'une « chaîne vertueuse du financement » en faveur de la création d'entreprise, et notamment la très petite entreprise, qui permette aux différents acteurs concernés d'entamer un dialogue et une coopération fructueuse. Cette coopération entre le banquier et le créateur devrait mettre fin à l'image du « créateur-braqueur » que ce dernier ressent trop souvent au moment de ses démarches.